Pour tuer le mal


POUR TUER LE MAL

NICOLAS MULLER, ELIZAVETA KONOVALOVA, FRANÇOIS GÉNOT, JÉRÉMIE GRANDSENNE, MANON BELLET

06.09.2014 - 26.10.2014
Dossier de presse
Cette exposition rassemble cinq artistes : explorateurs de matières, dessinateurs chevronnés et collectionneurs d’objets trouvés. Attentifs aux matériaux qu’ils emploient, traces, coulées de peinture, marques d’usure, rouille jalonnent leurs travaux. Des artistes qui rendent sensible leur environnement en y extrayant certains emblèmes, certains débris témoins de notre monde, portant la marque d’une utilisation, voire d’un choc ou d’un accident. Autant de vestiges présentés pour cette exposition qui placent le geste au premier plan, en porte-à-faux avec le décor aseptisé et les objets lisses de notre quotidien.

Pour tuer le mal, Jérémie Grandsenne préconise l’usage d’une ancienne et majestueuse arquebuse japonaise parée de dorures. Mais peut-être éradique-t-il aussi ce mal en collectant puis en détournant par l’écriture et le caviardage divers documents allant de la brochure publicitaire insipide à la page respectable du livre d’histoire. Les légendes tantôt cruelles, tantôt poétiques détournent le sens du document-source et s’ajoutent aux traces d’usures et aux indices évoquant d’anciennes manipulations.

Dans le même temps, Elizaveta Konovalova remet en question nos objets du quotidien caractérisés par leur uniformité. En témoigne son assortiment de papiers millimétrés marouflé à même le mur, qui transforme cet outil-support indiquant la norme et la mesure en motif géométrique variable. L’ordonnancement des formats sur le mur est inattendu, les feuilles se chevauchent les unes avec les autres. La règle s’amenuise au profit d’un dispositif coloré et dynamique. Sa collection d’allumettes impropres à l’utilisation du fait de leur défaut de fabrication, célèbre la malfaçon et permet d’observer les micro failles de nos systèmes de production automatisés.

La série d’arceaux en acier inoxydable de Nicolas Muller révèle aussi l’erreur, ou plutôt l’étourderie. Celle de l’automobiliste ayant heurté ces barrières de l’espace public délimitant les zones franchissables ou non. La norme est brisée, mais les arceaux s’ancrent dans un socle géométrique en béton qui agit comme un rappel nostalgique de leur autorité perdue. L’artiste donne à voir les stigmates d’un accident ou d’un acte de vandalisme symbole d’une dissidence, mais aussi un dessin. Une série de lignes brisées dans l’espace. De dessin, il en est fondamentalement question dans le travail de Nicolas Muller.

Construction et geste débridé se toisent et cohabitent sur la feuille, à l’instar des encres sur papier de François Génot, dont le déploiement libre a été figé et cristallisé sous l’effet du gel de l’hiver. La glace se mêle au geste. Mais aussi le feu, ou l’air : Manon Bellet plaque un support métallique chauffé par les rayons du soleil à la surface de feuilles de papier thermique. Il en résulte une série d’impressions de chaleur, comme de mystérieuses radiographies à la composition aléatoire, qui rendent visible ce qui ne l’est pas ; tout comme ses cyanotypes qui rendent tangibles les mouvements de l’air. Dans un dernier élan, François Génot livre une série d’ouvrages trouvés ayant été raturés par des enfants. First Explosion, titre donné à cette installation, est une invitation à la dissidence douce et un hommage à la spontanéité de l’enfance qui fait fi des règles et des conventions.

Nicolas Muller
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