One size fits all


ONE SIZE FITS ALL

NATHALIE TALEC

  05.09.2020 - 29.11.2020
Dossier de presse
Septembre est habituellement l’un des temps forts de la mode à Paris. Mais cette année, avec l’annulation de la Fashion Week, des défilés et salons, les galeries du marais ne prêteront pas leurs espaces aux maisons de mode et ne se transformeront pas en show rooms. A contre-pied (puisqu’elle n’a jamais loué son espace à ces occasions), la Galerie Maubert dédie une exposition à une ligne très particulière. Les objets créés par Nathalie Talec sont à la des fois habits singuliers, des doudounes contre le froid, des sculptures praticables et même des lieux de performances. Ils reviennent à la fonction première de l’habit : celle de protéger.
Le masque (le « caché ») et le vêtement (la « protection ») ont toujours fait partie de l’univers scientifico-fictionnel, poétiquement glacé, de Nathalie Talec : une artiste, attirée par les pôles et bercée par les récits anciens et modernes des explorateurs tel Paul-Émile Victor. En quête de pureté originelle et fascinée par l’action du froid, Nathalie Talec expérimente, à travers lui, les questions de perception – sens, émotions, interactions – et les liens synesthésiques qui nous mènent du toucher au rêve éveillé. Si, dès les années 80, elle pose à coté de ses « inventions » (comme la « lunette d’observation des distances en terre froide » ou le « microphone de tempête », réalisées en 1986 avec le matériel de Paul-Emile Victor), la série de sculptures-vêtements GIMME SHELTER Collection, entamée en 2019 pour l’exposition Coup de Foudre à la Fondation EDF, en duo avec Fabrice Hyber, continue à poser la question de l’objet rituel permettant le passage du corps à l’esprit : ainsi faut-il voir ces doudounes géantes comme des abris émotionnels, là où l’esprit peut se réfugier, survivre. Tout comme l’étaient, par exemple, les costumes rituels des indiens de la Terre de Feu. 
L’exposition One size fits all à la Galerie Maubert associe à ces sculptures-vêtements des ensembles de dessins anciens (les « sacs à dos/abris », 1985) ou récents (des dessins à la feuille d’or de silhouettes en apesanteur (Shamanic apparition, 2020), des aquarelles préparatoires aux vêtements mais aussi des autoportraits associés à des objets-masques fantastiques et capuches disproportionnées), des photographies vintages (Cinq minutes sur la route du pôle, où l’artiste-esquimau performe dans le métro de Cologne en 1983 ) et des vidéos (Gravité, 1981). Ce qui nous frappe dans cet ensemble flottant au son de la musique composée par l’artiste, c’est la façon dont le corps, anonyme jusque dans l’utilisation d’icônes (la Barbie) ou le travestissement des autoportraits, devient le corps de tous. Celui qui survit. Et si les images se superposent, si les visages s’effacent, se cachent, c’est moins pour disparaître que pour favoriser une nécessaire introspection dans l’anonymat de la beauté ou le refuge de l’art. 
Ainsi chez Nathalie Talec, design, sculptures, dessins, performances et musique, forment un « art total », mais surtout un « art pour tous ». Pratiques et praticables, ses sculptures-vêtements, aux formes variées et couleurs acidulées, sont destinées à tout le monde, sans distinction de taille, de couleur, de sexe : taille unique, « One size fits all », comme nous le rappelle l’album rock de 1975 de Frank Zappa. La morphologie du corps n’impose plus la forme du vêtement, c’est au vêtement-sculpture (pièce unique) de proposer une posture. Ces doudounes géantes, du manteau-guêtre à la robe de mariée (« abri nuptial ») en passant par le monokini et le masque, sont avant tout des abris, ceux qui renferment nos émotions, permettent un repli stratégique sur soi avant d’entamer l’exploration du monde. Faisant le parallèle avec nos émotions, Nathalie Talec développe une série de vêtements « adaptables » : les fermetures-éclair rendent les manches et cuissardes détachables, on passe ainsi d’un habit d’hiver à un d’été́, d’une émotion à une autre. Une jupe se transforme en sac de couchage, une robe de mariée en tente-igloo... Le vêtement devient une « scène » tout comme le proposaient le pilier du Bauhaus, Oscar Shlemmer, avec son Ballet Triadique ou Kasimir Malevich avec l’opéra futuriste Victoire sur le Soleil
Techniquement Nathalie Talec revendique une simplicité́ des matériaux et couleurs : l’extérieur en vinyle brillant, la doublure en Néoprène 3D, l’intérieur en ouate, des bandes velcro et/ou des fermetures éclair sur mesure (8mm de large). Chaque vêtement est une pièce unique en une couleur spécifique (jaune, rouge, noir, vert, argent, et/ou bleu). Et même si les matériaux ne sont pas des matériaux « techniques », c’est la forme elle-même qui va en assurer la fonction. Par exemple, l’efficacité thermique d’une doudoune provient souvent du « gonflant » (i.e. la quantité d’air enfermé) à l’intérieur du tissu : chez Nathalie Talec, le « manteau-boule » par exemple, par sa forme-même renferme cet air et joue le rôle d’isolant. Ainsi la forme devient le refuge des sens.
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